Classification botanique
Le concombre, Cucumis sativus, fait partie de la famille des Cucurbitaceae et de la tribu des Melothrieae.
Le genre Cucumis comprend environ 38 espèces connues.
Il existe cinq types de concombres :
- Les concombres de plein champ dont l’épiderme est recouvert de petites épines blanches ou noires ;
- Les concombres de serre qui ont un épiderme très lisse et qui sont dérivés de types orientaux à fruits très allongés ;
- Les concombres de type “Sikkim” dont l’épiderme est dans les tons rouges-oranges ;
- Les concombres à très petits fruits à confire que l’on appelle cornichons ou gherkins ;
- Les concombres de forme ronde de type “Apple” ou “Lemon”.
Pollinisation
Le concombre est une plante monoïque, à savoir portant sur le même plant des fleurs mâles et femelles à des endroits différents.
Le concombre peut être auto-fécondé : une fleur femelle peut être fertilisée par du pollen provenant d’une fleur mâle de la même plante. Cependant, les fécondations croisées sont prédominantes : la fleur femelle est fertilisée par du pollen provenant de différentes plantes de la même variété ou d’une autre variété. Ce sont les abeilles qui sont le principal vecteur de ces pollinisations croisées. En fonction des régions et des environnements, la distance d’isolement conseillée entre deux variétés de concombres varie de 400 mètres à 1 kilomètre.
En début de croissance, il y a normalement un peu plus de fleurs mâles. L’expression sexuelle, chez le concombre, est généralement influencée par l’environnement. Les fleurs mâles prédominent par jours longs et par forte intensité solaire. Les fleurs femelles prédominent par jours plus courts et par intensité solaire moindre. Des recherches récentes tendent à mettre en valeur que le plus grand nombre de fleurs femelles est produit lors de journées de 11 heures.
La technique de pollinisation manuelle, lorsque l’on a plusieurs variétés de concombres dans le même jardin, est la même que pour les courges : elle consiste à ligaturer le soir les fleurs mâles et femelles qui vont s’épanouir le lendemain matin.
La ligature s’effectue à l’extrémité de la fleur. Nous utilisons tout simplement du ruban adhésif destiné à protéger les bords des huisseries dans les travaux de peinture. Il est conseillé de ligaturer au moins deux fleurs mâles pour chaque fleur femelle à polliniser.
Le matin, les fleurs mâles sont cueillies, libérées de leur ligature et leurs pétales sont ôtés. Le ruban adhésif de la fleur femelle est ensuite délicatement enlevé. Si l’une ou l’autre fleur, une fois libérée de la ligature, ne s’épanouit pas totalement et naturellement, c’est qu’elle n’est pas “mature” : on ne peut donc pas l’utiliser pour le processus de pollinisation manuelle.
Il n’est pas toujours aisé de déterminer avec sureté les fleurs de concombre qui sont proches de l’épanouissement. C’est un processus qui exige beaucoup de perspicacité et une très grande patience. Nous conseillons aux débutants de s’exercer, à ces techniques de pollinisation manuelle, en commençant par les courges.
Les chances de succès pour les pollinisations manuelles de fleurs de concombres sont environ de 85 %.
Il est déconseillé d’utiliser cette technique lors de périodes de sécheresse ou de très fortes chaleurs.
Pour une production de semences bénéficiant d’une bonne diversité génétique, il est recommandé de cultiver au minimum 6 plantes de chaque variété. L’idéal est d’en cultiver une douzaine.
Les jardiniers souhaitant produire leurs propres semences peuvent sans problème cultiver ensemble une variété de concombre (Cucumis sativus), une variété de melon (Cucumis melo), une variété de pastèque (Citrullus lanatus). Ces plantes ne peuvent pas s’hybrider mutuellement.
Production de semences
Il est indispensable de laisser mûrir les fruits complètement sur la plante avant d’en extraire les semences.
Cela veut dire que les concombres ne sont plus comestibles : ils ont grossi et ont commencé à se ramollir.
À maturité complète, l’épiderme du fruit prend la couleur finale qui est caractéristique de la variété. De plus, lorsque les semences sont mûres à l’intérieur du fruit, le pédoncule à tendance à sécher.
L’extraction de semences s’effectue en coupant les fruits en deux dans le sens de la longueur et en évidant la cavité centrale avec une cuillère.
Il est conseillé de laisser fermenter les semences, durant quelques jours (en fonction de la température ambiante) dans un peu de jus et d’eau. L’eau ne doit pas être ajoutée en excès car cela peut ralentir le processus de fermentation. Le récipient doit être laissé dans un endroit ombragé et protégé, recouvert d’une tulle afin d’éviter que les mouches n’y pénètrent. Le processus de fermentation permet aux semences de se dégager plus facilement de la pulpe qui les entoure et d’être nettoyées très aisément. Le processus de fermentation est achevé lorsque la plupart des semences sont allées au fond du récipient. Elles sont alors lavées à grande eau dans une passoire à fine maille et mises à sécher de suite.
Durant les deux premiers jours de séchage, il est conseillé de détacher, avec les doigts, les semences collées les unes aux autres. Le séchage prend de 5 à 10 jours, en fonction des conditions climatiques ambiantes.
Les semences de concombre et de cornichons ont une durée germinative moyenne de 10 années et plus.
On peut trouver approximativement de 100 à 500 semences dans un fruit, en fonction des variétés. On trouve de 30 à 40 semences au gramme selon les variétés.
Pour la petite histoire, R.W. Robinson rapporte que des semences d’une variété de concombre originaire d’Inde produites en 1955 (à la station expérimentale de Geneva dans l’état de New-York) et stockée depuis 1971 (à quelques degrés au-dessus de 0 °C et à 17 % d’humidité relative) furent semées en 1986 : après 31 ans, les semences germèrent à plus de 90 % et produisirent des plantules vigoureuses ! Cette variété sans nom de l’Inde dotée du matricule PI 197087 était résistante à 7 maladies et aux araignées rouges. Elle fut utilisée comme parente des variétés modernes Pixie et Polaris. Cette histoire révèle premièrement la capacité des semences de perdurer dans le temps, dans de bonnes conditions de conservation. Elle révèle ensuite l’importance extrême de la biodiversité. Une variété inconnue d’Inde a pu conférer sa résistance à de nombreuses maladies à des variétés modernes utilisées dans l’agriculture intensive.
D’autre part, L. N. Bass a reporté, en 1980, qu’il y avait peu de baisse de germination dans la plupart des variétés de concombres, de melons et de pastèques au bout de 9 années de conservation à 10 °C et 50 % d’humidité relative.
Ces recherches prouvent que des semences de concombre peuvent garder leur capacité de germination intacte pendant plus d’un quart de siècle lorsqu’elles sont conservées au frais et au sec.
Erosion génétique
En 1925, l’ouvrage les Plantes Potagères de Vilmorin-Andrieux présentait une trentaine de variétés de concombres.
Sur le catalogue officiel de 1995, 30 variétés de concombres sont inscrites dont 5 non-hybrides (parmi lesquelles 3 anciennes variétés, à savoir 10 %).
Sur le catalogue officiel de 2004, 36 variétés de concombres sont inscrites dont 3 non-hybrides (parmi lesquelles 2 variétés anciennes). Les hybrides F1 représentent donc, en 2004, 92 % et les anciennes variétés 5 %.
Des 25 variétés hybrides F1 inscrites en 1995, il ne reste que 11 variétés en 2004, à savoir une désinscription de 56 %.
Cela signifie également que sur les 33 variétés hybrides F1 inscrites en 2004, 22 variétés ont moins de 10 ans.
Aux USA, selon l’étude du Seed Savers Exchange, des 152 variétés non-hybrides de concombres présentées dans les catalogues de semences en 1981, il ne restait que 66 variétés en 2004, ce qui représente une perte de 57 %.
La majorité des variétés modernes hybrides F1 sont des variétés parthénocarpiques, à savoir que le fruit peut se développer sans fécondation et sans production de semences. Pourquoi ? Voici l’explication de Michel Pitrat (Histoire de Légumes. INRA): « En économisant la matière sèche très importante immobilisée par les graines, la parthénocarpie permet de forts rendements potentiels en fruits ».
Ainsi que le répète depuis de longues années notre ami Jean-Pierre Berlan (directeur de recherches à l’INRA) dans ses diatribes enflammées contre les OGMs et la supercherie des hybrides F1 : les hybrideurs modernes essayent par tous les moyens de contrecarrer cette fâcheuse tendance qu’ont les plantes alimentaires de se reproduire dans le champ du paysan !
La Nature, dans sa générosité, selon les hybrideurs F1 modernes, en l’occurrence des sélectionneurs Hollandais, gaspillerait donc de la matière sèche à produire de la semence !
Les producteurs de concombres ne se facilitent pas d’ailleurs la tâche : non seulement sont-ils obligés de racheter des semences hybrides F1 tous les ans, mais encore faut-il qu’ils éloignent toute abeille ou tout autre insecte pollinisateur qui pourrait amener un vrai pollen fertile et produire des fruits déformés pour cause de fécondation.
Toutes ces variétés modernes seraient issues de variétés anglaises du 19 ème siècle à tendance parthénocarpique. Qui sait ? En tout cas, la variété Télégraphe génère encore assez de semences pour que des producteurs bios puissent en générer des revenus. Avec toute cette parthénocarpie, d’ailleurs, comment les Espagnols peuvent-ils encore appeler le concombre «pepino» ? Un jardinier pratique va se demander comment on peut produire de la semence à partir d’une variété qui ne produit pas de semences. On se doute que le processus n’est pas des plus naturels. Les semenciers ne travaillent qu’avec des plantes gynoïques (ne produisant que des fleurs femelles). Ils empêchent la synthèse de l’éthylène (avec une substance telle que le nitrate d’argent) pour faire émerger des étamines (donc la partie mâle) dans les fleurs femelles (qui ne sont pas supposées être mâles). Ils autofécondent ensuite ces plantes femelles pour produire de la semence. Pourquoi faire simple alors qu’on peut générer un marché captif en rendant les choses extrêmement complexes ? Les sélectionneurs Hollandais sont encore allés plus loin dans les processus d’érosion génétique. Ils ont créé des variétés non amères à partir d’une base génétique pour le moins étroite : en effet, lors d’un criblage de 15 000 plantes, ils ont découvert une plante de la variété anglaise «Long vert amélioré» avec des fruits non amers. Toutes les variétés modernes sans amertume sont issues de cette seule et unique plante. Comment certains peuvent-ils encore oser parler de biodiversité en se référant aux listes des catalogues officiels ? Nous sombrons en fait dans une totale bioscarcité.
Sur le catalogue officiel de 2011, 44 variétés de concombres sont inscrites dont 41 variétés hybrides F1 , à savoir 93 %. Limagrain en détient 18 variétés (44 %), Monsanto en détient 17 variétés (41,5 %) et Syngenta en détient 7 variétés (12 %).
Trois groupes semenciers contrôlent 97,5 % des variétés F1 de concombres du catalogue Français. Donc, deux multinationales de l’agro-chimie/pesticides, Monsanto et Syngenta, contrôlent 53,5 % des variétés F1 de concombres du catalogue Français.
Comme la très grande majorité des concombres bios sont produits à partir d’hybrides F1, cela veut dire que plus d’un concombre bio sur deux appartient, variétalement parlant, à Monsanto et à Syngenta. Et l’autre appartient à Limagrain, ce qui ne vaut guère mieux. C’est la même mafia.