Pourquoi Réseau Biocoop ne dénonce-t-il pas le nouvel article 11 de la loi biodiversité de juillet 2016 ?

Pourquoi Réseau Biocoop ne s’attaque-t-il pas, lui même, aux vrais promoteurs de l’hybridation du végétal – qu’il évoque à la fin de sa réponse à Kokopelli – en dénonçant le nouvel article 11 de la loi biodiversité de juillet 2016 – un article liberticide sous divers aspects – qui ne permet justement pas aux maraichers bios d’avoir accès à des variétés du Domaine Public non enregistrées dans le Catalogue Européen ?

Nous souhaitons préciser que lorsque nous nous adressons au Réseau Biocoop – ou à sa centrale, à Paris, dirigée par Claude Gruffat et Gilles Piquet-Pellorce, un professionnel des transports routiers – c’est à la société Biocoop SA que nous nous adressons. Nous sommes fort conscients que les gérants des centaines de magasins Biocoop sont, parfois, quelque peu perdus dans toutes ces interrogations – préoccupés qu’ils doivent être, avant toutes choses, d’honorer une demande sans cesse croissante pour des produits sains et non toxiques. Nous sommes, également, fort conscients que de nombreux militants soutenant des Biocoops, au statut associatif, font de leur mieux pour développer des circuits courts tout en étant désemparés par les problématiques que nous soulevons quant à la Bio Piratée: majorité d’hybrides F1 dans les légumes bios, importation de légumes bios, importation de la bio masse organique en provenance des pays du Tiers-Monde pour fertiliser les sols des maraichers bios, contrôle des multinationales sur toutes les variétés utilisées en bio, contrôle des multinationales sur la distribution des produits bios, etc, etc.

C’est la première fois, depuis nos premiers articles sur la Bio-Piratée, en février 2014, que nous avons l’extrême plaisir d’analyser une réponse officielle de Réseau Biocoop (placée ci-dessous)  qui se voudrait cohérente. La tomate fait mouche chez Réseau Biocoop… et la direction a pris la mouche de se voir confrontée à son passé peu glorieux de fausses tomates anciennes, et hybrides F1, et à son présent, tout aussi peu glorieux, de vraies tomates hybrides F1 – et pour la plupart de vraies “long life” imputrescibles – et à la saveur indescriptible !

Nous sommes fort aises que la centrale Biocoop ait “voté” pour éliminer les fausses anciennes variétés de tomates très récemment, en début 2016 – et en même temps, sans doute, que sa décision d’éliminer, de ses étals, la quinoa Bolivienne qui constitue une problématique glissante plus que de saponine ?

Il semblerait, de plus, que ce soit la tendance dans l’interprofession qui s’exprime ainsi : « 2015 se caractérise par une évolution remarquable de la segmentation avec une présence plus affirmée de variétés à “goût” comme Noire de Crimée, Ananas, Cornue des Andes, Green Zebra, Marmande, et les véritables Cœur de bœuf. A l’inverse les productions de rondes classiques diminuent encore »

Cela ferait donc 20 années que Réseau Biocoop promeut les anciennes variétés de tomates à “goût” pour en arriver à un volume de 19 tonnes en 2014, à savoir, grosso modo, 55 kilos par magasin et par année – le volume de vente, en une seule journée, pour un maraicher bio sur un marché local. Il n’est donc pas étonnant que le moindre effort “de production localisée” permette de décupler un volume aussi ridicule en l’espace de 2 années. Et il semblerait, d’ailleurs, que la cellule communication Biocoop se soit lâchée sur un zéro impertinent.

En effet, la vérité est que Réseau Biocoop ne promeut pas, sur ses étals, les anciennes variétés depuis 20 années car cela nous ramènerait à l’année 1997, l’année-même où Terre de Semences, l’ancêtre de Kokopelli, a refusé de cautionner la fiction juridique que constitue le Catalogue GNIS de “variétés amateurs”. Tout au contraire d’autres sociétés semencières bios (Biau Germe, Germinance), partiellement bios (Ferme de Sainte Marthe qui était encore, alors, la propriété de Philippe Desbrosses avant d’être rachetée par Voltz et ensuite par le bulbier Turc d’Angers) et non bios (Baumaux, etc) qui ont cautionné ce catalogue farceur – qui interdisait déjà aux maraichers bios l’accès de ses “variétés amateurs”. 

En 1997, Terre de Semences était tout seul à lutter, contre les Autorités, lâchement abandonné par les autres semenciers bios et tout autant abandonné par la FNAB (Fédération Nationale de l’Agriculture Biologique), le grand partenaire de Réseau Biocoop et de toute l’Industrie Bio, qui a alors bien montré où étaient et où sont encore ses allégeances. 

Nous reconnaissons, cependant, que certaines Biocoops (Scarabées, Nouveaux Robinsons, pour n’en nommer que quelques unes) nous ont distribués depuis quasiment la création de Terre de Semences dans l’Allier en 1994. Et nous les remercions sincèrement pour leur soutien pionnier et indéfectible à la cause de la “Libération de la Biodiversité et de l’Humus” (qui fut alors le logo très évocateur de Terre de Semences).

Nous ne nous reconnaissons pas dans le rôle “d’accableur de la minorité” tel que mentionné dans la dernière partie de la réponse de Réseau Biocoop. Tout d’abord, parce qu’il semblerait difficile au Réseau Biocoop de se mettre dans la position d’une “minorité” alors que sa puissance commerciale lui permettrait de secouer les inerties ambiantes si tel était le désir de sa direction. Secondement, parce que cela fait 25 années que nous sommes en première ligne, sur le front de la Libération des Semences, et que dans ce domaine, nous n’avons pas de conseils à recevoir de la centrale du Réseau Biocoop.

Nous serions même enclins à lui renvoyer le même conseil. En effet, le Réseau Biocoop peut sûrement comprendre que toute loi légalisant des variétés potagères du Domaine Public non inscrites, au seul bénéfice d’associations de loi 1901 est, de facto, une imposition quasi obligatoire de l’hybridation à tous vents du maraichage professionnel, donc du maraichage bio. Pourquoi donc, alors, Réseau Biocoop ne s’attaque-t-il pas, lui-même, aux vrais promoteurs de l’hybridation du végétal – qu’il évoque à la fin de sa réponse à Kokopelli – en dénonçant le nouvel article 11 de la loi biodiversité de juillet 2016 – un article liberticide sous divers aspects – qui ne permet justement pas aux maraichers bios d’avoir accès à des variétés du Domaine Public non enregistrées dans le Catalogue Européen ?

Une telle prise de position de Réseau Biocoop ne serait-elle pas en harmonie avec son souhait de travailler avec le Réseau Semences Paysannes sur des semences “paysannes et citoyennes” ? Et son souhait futur, peut-être même, de travailler avec Kokopelli sur des variétés potagères “paysannes et citoyennes” ? Citoyennes dans le sens de “appartenant au Domaine Public et en pollinisation ouverte” au lieu d’appartenir à Monsanto, à Limagrain, à Syngenta/ChemChina, à Bayer, à Dupont, etc… qui sont les propriétaires réels des variétés de tomates utilisées pour le volume de 700 tonnes commercialisées annuellement par Réseau Biocoop.

En conclusion, encore bravo au Réseau Biocoop de se lancer avec une telle fougue, et un tel enthousiasme, dans la promotion des vraies anciennes variétés de tomates tout autant que des vraies variétés modernes de tomates de Tom Wagner, d’Alan Kapuler… et d’une pléthore d’autres agronomes amateurs et professionnels au plaisir du Domaine Public. Nous ne pouvons qu’espérer qu’une telle fougue se dissémine, dans les centaines de magasins Biocoop, pour la promotion de variétés potagères non hybrides et pour la relocalisation de toutes les chaines de production afin d’éliminer toutes les multinationales de la Bio Piratée qui ont pris le contrôle de la nutrition vivante. 

Xochi. Le 5 août 2016. 

 

 

Biocoop répond aux critiques de Kokopelli sur les tomates hybrides

Le 3 août 2016. Source Cyberacteurs. 

Bonjour,

Suite à votre sollicitation concernant l’article publié sur Kokopelli, vous trouverez ci-dessous la réponse de Biocoop :

Le réseau Biocoop a été, est et sera toujours pionnier concernant le renouveau des variétés anciennes en particulier de tomates et ce depuis plus de 20 ans. Le réseau entier est mobilisé pour privilégier les semences « non hybrides » notamment en commercialisant les semences Kokopelli.

Biocoop a voté l’interdiction des variétés hybrides imitant les tomates anciennes au début de l’année 2016. En effet, l’article cité par Kokopelli date de l’été 2015 et n’est plus d’actualité (c’est pourquoi il a été supprimé)

Il ne reste plus donc aujourd’hui que des tomates hybrides classiques (rondes, grappes et ovales) et des tomates anciennes véritables non hybrides. Chez Biocoop, les tomates hybrides représentent un volume de 700t et les tomates anciennes véritables atteignent elles un volume de 220t. Ce volume n’était que de 19t en 2014. C’est grâce au travail que Biocoop a réalisé avec ses partenaires producteurs que ce chiffre a été multiplié par 10 en deux ans. C’est, à notre connaissance, la seule progression de cette ampleur dans la distribution de tomates en France.

Nous mettons, comme à notre habitude, toutes nos compétences en structuration de filières agricoles (prix garantis, contractualisation de volumes prévisionnels élaborés avec les producteurs) au service du renforcement de la production de tomates anciennes véritables.

Le schéma logistique Biocoop implique un circuit long qui n’est pas forcément favorable à la conservation de toutes les variétés de tomates anciennes véritables. C’est pour cela que nous encourageons fortement nos magasins (y compris financièrement) à se fournir en tomates anciennes véritables non hybrides auprès de fournisseurs locaux répondant ainsi également à l’objectif de localisation des approvisionnements.

Enfin nous travaillons de manière étroite avec le Réseau Semences Paysannes pour le développement de produits issus de semences paysannes et citoyennes.

Loin de nous l’idée de nous parer des vertus de la perfection mais notre souci constant de progression vers une agriculture, une distribution et une consommation cohérentes, responsables et respectueuses de nos valeurs sans cesse réaffirmées nous semblent être la voie juste.

Mais il est certes plus facile d’accabler la minorité de ceux qui essaient de faire quelque chose plutôt que de s’attaquer aux vrais problèmes et aux vrais promoteurs de l’hybridation du végétal.

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