Classification botanique
Cichorium endivia, fait partie de la famille des Asteraceae et de la tribu des Lactuceae. Le genre Cichorium comprend environ 9 espèces connues.
Pollinisation
L’inflorescence des chicorées scaroles et frisées est un capitule composé de fleurons ligulés de couleur bleu pour la scarole et de bleu-violacé pour la frisée. Cette inflorescence est hermaphrodite. Elle s’épanouit à l’aube et se ferme vers midi. Les chicorées scaroles et frisées sont des plantes auto-fécondes mais qui, selon certains auteurs, tendent plus ou moins vers l’allogamie. Ce sont les insectes qui sont alors le vecteur des pollinisations croisées.
Les abeilles sont les pollinisateurs les plus efficaces et certains chercheurs ont mis en valeur que la production de semences est améliorée lorsque les plantes porte-graines de chicorées scaroles et frisées ne sont pas sous voile.
Suzan Ashworth dans “Seed to Seed” préconise une distance de 500 mètres entre deux variétés de chicorées scaroles et frisées. Raymond A.T. Georges considère que les chicorées scaroles et frisées sont “principalement” autogames et il préconise dans “Vegetable Seed Production” la même distance que pour les laitues, à savoir quelques mètres seulement.
Michel et Jude Fanton, du réseau Australien de sauveteurs de semences, ne préconisent aucune distance d’isolement, dans “The Seed Savers Handbook”, et considèrent que les chicorées scaroles et frisées sont totalement autogames. Ces incertitudes peuvent avoir été générées par le fait que toute variété de l’espèce Cichorium intybus (endives, chicorées amères) peut être hybridée naturellement par du pollen d’une des variétés de l’espèce Cichorium endivia alors que le contraire n’est pas vrai car il a été prouvé que les variétés de chicorées scaroles et frisées ne peuvent pas être fécondées par du pollen issu de Cichorium intybus.
Nous en profitons pour mentionner une autre source de confusions. Le terme “endive” est actuellement utilisé pour caractériser des variétés de l’espèce Cichorium intybus alors que les termes de “vraie endive” ou “endive à feuilles larges” d’antan s’appliquaient à des variétés de l’espèce Cichorium endivia. D’ailleurs, les Anglo-Saxons ont conservé le terme “endive” dans son sens premier.
Nous avons pratiqué pendant des années l’isolement total car nous ne connaissions que l’ouvrage de Suzan Ashworth. Il est possible que nous ayons été trop prudents.
Cependant, nous ne pouvons avoir une foi aveugle dans les théories officielles échafaudées la plupart du temps dans des environnements complètement stériles et exempts d’insectes pollinisateurs. Les cages voilées restent un bon remède à tout type d’angoisse génétique existentielle, surtout lorsqu’on est assuré du caractère totalement auto-fécond d’une espèce car, dans ce cas, il n’est nul besoin de se préoccuper de l’introduction d’insectes pollinisateurs ou bien de soulever les cages par alternance afin de permettre à ces insectes pollinisateurs de féconder les fleurs.
Production de semences
Les chicorées scaroles et frisées sont des plantes bisannuelles mais qui peuvent monter à graines durant la première saison de culture si elles sont semées trop tôt ou si elles sont exposées à un stress généré par des températures froides en jours courts. Ces plantes ne doivent pas être conservées pour la production de semences.
Il est conseillé de semer les chicorées scaroles et frisées en fin d’été, ou au début de l’automne, en fonction des régions. Les chicorées sont laissées en terre durant l’hiver et elles montent à graines durant le printemps.
Dans les régions aux hivers très vigoureux, des chicorées matures risquent de ne pas survivre durant les périodes de très basses températures.
On peut alors :
- les arracher, les rabattre à quelques centimètres au dessus du collet, et les mettre dans du sable humide afin de les replanter au printemps ;
- L’autre alternative consiste à semer les chicorées scaroles et frisées de telle sorte que les plantes ne soient pas trop développées à l’approche des grands froids afin qu’elles puissent y résister.
Les semences mûres de chicorées ont un tempérament insolite :
- soient elles tombent à terre et se resèment abondamment et naturellement ;
- soient elles refusent de sortir de la petite coque qui les enserre. Le jardinier a le choix entre le semis des petites coques contenant plusieurs graines (et l’éclaircissement subséquent) et l’usage de moyens vigoureux permettant de déloger les graines : roue de tracteur, coups de marteaux …
Les semences de chicorée ont une durée germinative moyenne de 10 années et plus.
Erosion génétique
« La conservation des ressources génétiques, bien que régulièrement évoquée, reste un domaine trop souvent délaissé. Devant cet état de fait et considérant que toutes les espèces ne pouvaient pas être menées de front, la section plantes potagères du Comité technique permanent de la sélection (CTPS) a proposé, fin 1992, la création d’un groupe de travail “ressources génétiques chicorées” ». Extrait de l’article sur les Chicorées signé par François Boulineau, Valérie Kelechian, Claire Doré et Bruno Desprez dans la revue Sauve qui Peut. 1994. En 1998, le BRG (Bureau des Ressources Génétiques) lance un “Appel aux collectionneurs pour retrouver les anciennes variétés de chicorées”. Son site internet nous informe que la Collection nationale comprend 660 accessions dont 227 lots de Cichorium endivia et 433 lots de Cichorium intybus et qu’en plus « cette collection est disponible, échangeable et valorisable ».
Que de bonnes nouvelles ! Et qu’en est-il réellement de la proportion d’anciennes variétés dans cette collection et surtout de leur accessibilité aux maraîchers et jardiniers ? Mauvaises nouvelles ! EGG : Erosion Génétique Galopante. Prenons l’exemple des “chicorées frisées” à partir de l’instauration du Catalogue Officiel :
– en 1952 : 38 variétés du domaine public.
– en 1995 : 32 variétés inscrites dont 11 variétés du domaine public. (trois étant des races de “Gloire de l’Exposition”.
– en 1997 : 41 variétés inscrites dont 11 variétés du domaine public. (trois étant des races de “Gloire de l’Exposition”.
– en 2001 : 46 variétés inscrites dont 10 variétés du domaine public.
– en 2004 : 52 variétés inscrites dont 9 variétés du domaine public.
Il reste quand même encore quelques anciennes variétés ce qui n’est pas le cas dans la section “endives” du Catalogue Officiel qui souffre d’une Erosion Génétique Extrêmement Galopante :
– 1995 : 33 variétés inscrites dont 26 hybrides F1 .
– 1997 : 32 variétés inscrites dont 28 hybrides F1 .
– 2001 : 35 variétés inscrites dont 33 hybrides F1 .
– 2004 : 39 variétés inscrites dont 37 hybrides F1.
L’une des variétés non-hybrides de la liste 2004 est en cours de radiation : encore un petit effort et le seuil des 100 % hybrides F1 aura été atteint ! L’édition du Catalogue Européen (catalogue des catalogues) de 1999 reflète bien cette situation car elle présente 60 variétés dont 55 sont des hybrides F1 .
Réagissant à cet état de fait, les auteurs du chapitre sur les chicorées dans l’ouvrage publié par l’Inra, Histoire de Légumes, commentent : « Toutefois, on peut estimer que la base génétique est trop étroite. Aussi un réseau de ressources génétiques créé en 1995 manifeste un grand dynamisme ». Un grand dynamisme au bénéfice de qui ? Est-ce au service de la création de nouveaux hybrides ? Evoquant l’augmentation des surfaces cultivées en chicorées à racines pour le sucre, les mêmes auteurs se réjouissent de la possibilité, depuis le début des années 1990, de fusionner les protoplastes de la chicorée et du tournesol, ce qui « ouvre la voie à la création sûre et économique de variétés hybrides ».
C’est de l’hybridité high-tech car les protoplastes ne fusionnent pas en plein champ sous l’effet du Saint Esprit. Les mêmes auteurs, dans le chapitre sus-cité, nous éclairent sur le travail intense qu’il a fallu déployer pour créer les hybrides d’endive F1 avec de l’argent public. Dès avant 1960, les chercheurs de l’INRA se sont attelés à forcer les endives à s’autoféconder avec tous les soucis afférents : faible vigueur, « perte d’intercompatibilité contre-sélectionnée par la série d’auto-fécondations antérieures », etc. Des dizaines d’années de labeur pour forcer l’endive de forçage à faire ce qu’elle n’avait pas envie de faire! Ils sont habiles nos chercheurs pour les chimères amères ! Comme disait le poète-chanteur: ma bile est amère et ma mère est habile! Que d’amertume! Mais réjouissons-nous: grâce à la lutte de nos amis Belges, en 2002, nous avons échappé aux chicorées OGM résistantes à un herbicide de Bayer. Etait-ce le même herbicide qui a décimé nos populations d’abeilles ?