Planète Terre : Planète Désert ?

Alors que quelques pantins s’agitent frénétiquement dans l’arène électorale, l’arène véritable (au sens latin du terme : “arena”, “sable”) recouvre inexorablement la terre de son linceul stérile. Les démagogues, de tous bords, promettent toujours plus de croissance : plus de salaires, plus de vacances, plus de travail, plus de consommation et bien sûr, plus de sécurité contre un ennemi inexistant.

Le seul terrorisme est alimentaire et ce sont eux qui l’ont mis en place avec leurs complices des multinationales.

La Planète se meurt d’extraction, se meurt de combustion. La Planète Terre commence à régler ses comptes avec l’humanité : à force de soustractions, c’est maintenant l’addition qu’elle présente !

Terrien, sors de ton rêve ! La Planète Terre s’enlise, s’ensable, se désertifie. Serait-ce que la Planète “déserte” l’humanité ? Le mot “désert” vient du latin “desertus”, de “deserere” qui signifie “abandonner”.

Dune : le destin de la planète terre ?

En 1957, le journaliste Frank Herbert est envoyé à Florence dans l’Oregon aux USA afin d’écrire un reportage sur un projet gouvernemental de lutte contre les dunes de sable par l’élaboration de barrières végétales. Il en repartit fasciné par l’écologie et les dunes de sable.

En 1965, Frank Herbert, devint l’un des grands maîtres de l’écologie-fiction et de la science-fiction en publiant le premier ouvrage de son épopée grandiose connue sous le nom de “Cycle de Dune”. Frank Herbert avait-il pressenti le destin inéluctable de notre planète ? Peut-on considérer Dune comme une allégorie ?

Quels sont les facteurs limitants de l’écosystème planétaire de Dune qui le sont également dans le nôtre ou qui pourraient le devenir à très court terme ?
  • Les vents de sables se déchaînent sur Dune à 700 km/heure.
  • Des vers gigantesques partagent la maîtrise de cette planète avec les Fremen (“Free Men” / Hommes Libres). Ils font plusieurs centaines de mètres de longueur et sont source de l’Epice.
  • Dune est une planète-désert. Le sable recouvre tout.
  • Dune est une planète sans eau : toute eau est recyclée, y compris l’urine, la transpiration et même “l’eau” des défunts.

Tempêtes d'humus, tempêtes de sable

En 1932, le “Dust Bowl” frappa les grandes plaines du sud des USA et s’installa pour une dizaine d’années. Les grandes tempêtes de sable (de parfois 3000 mètres d’épaisseur) apportèrent ruine et dévastation : elles furent au nombre de 70 en 1933, 73 en 1936 et 134 durant les 9 premiers mois de 1937. Le 9 mai 1934, une tempête de sable partit du Montana et du Wyoming et emmena dans son sillage 318 millions de tonnes de sol. L’année 1938 vit la perte de près d’un milliard de tonnes de sol. En mars 1939, une tempête de sable de l’Oklahoma embarqua une quantité de sol suffisante pour recouvrir d’une épaisseur de 30 cm une surface de 2,5 millions d’hectares (le dixième de la surface agricole de la France).

Les dunes de sable envahirent les champs, faisant parfois 500 mètres de longueur et 7 mètres de hauteur. L’agriculture fut anéantie : 30 millions d’hectares furent abandonnés. Ce fut l’exode pour 3,5 millions de citoyens US.

Durant cette période, de nombreux cataclysmes naturels aggravèrent le cycle de vents de sable et de sécheresse : orages de grêle, températures extrêmes, électricité statique, inondations.

Selon les experts en paléoclimatologie, qui ont étudié les cycles de sécheresse sur 2000 ans aux USA, les périodes de sécheresse du 20 ème siècle sont loin d’avoir été les plus sévères de l’histoire de cette partie du continent.

Pourquoi le “Dust Bowl” fut-il alors si dramatique ? Tout simplement parce que cette région des USA n’aurait jamais due être labourée ! Pendant des milliers d’années, ces vastes étendues d’herbes semi-arides ont été balayées par les vents et sujettes à des cycles de sécheresse pouvant durer de 25 ans à 70 ans ! Et pourtant, les colons avaient été prévenus par les Amérindiens qui leur conseillaient de ne pas ouvrir les terres de leur charrue et surtout de ne pas toucher à l’herbe.

La leçon du “Dust Bowl” fut-elle apprise ? Pas du tout. La seconde guerre mondiale fit monter les cours agricoles et les agriculteurs recommencèrent à labourer des terres marginales. Les tempêtes de sable revinrent de 1954 à 1957 et la dévastation s’étendit sur deux fois plus de terres que lors des années 30. Dans les années 1970, les USA vendirent du blé à l’URSS et les cours flambèrent. Les agriculteurs mirent les bouchées doubles (et les charrues quadruples) et les tempêtes de sable revinrent.

La leçon du “Dust Bowl” ne servit pas plus aux agriculteurs du Kazakhstan. De 1960 à 1980, ils détruisirent les prairies pour les remplacer par de la culture de blé sur 26 millions d’hectares : l’équivalent de la surface en blé cumulée du Canada et de l’Australie ! Dès 1980, l’érosion terrible par le vent remettait en cause la viabilité économique des fermes suite à une baisse drastique de productivité. En 2000, la surface en blé couvrait moins de 13 millions d’hectares avec des rendements de l’ordre d’1 tonne par hectare ! En l’espace de 20 années, donc, le Kazakhstan a abandonné la culture du blé sur une surface agricole équivalente à la surface en blé du Canada. Combien de millénaires seront nécessaires pour régénérer ces sols détruits par l’érosion éolienne ?

L’érosion éolienne peut également se manifester par des transits inter-continentaux. Tout comme le nuage de Tchernobyl ne fut pas arrêté par la frontière suisse (c’est d’ailleurs un certain Mr. Nicolas Sarkosy qui était chargé de mission pour la lutte contre les risques chimiques et radiologiques à cette époque), les tempêtes de sable ne reconnaissent aucune frontière et exportent de la matière première précieuse sans qu’aucun droit de douane ne soit perçu.

En avril 2001, une “tempête de sol” de 1800 km d’amplitude s’envola de Chine (transportant des millions de tonnes de sol) pour venir atterrir en Amérique du nord : elle recouvrit de son manteau toute la partie ouest, de l’Arizona au Canada.

La Corée du sud est, elle-aussi, périodiquement paralysée par d’immenses tempêtes de sable en provenance de la Chine. Fin avril 2007, une telle tempête frappa le pays. Le 1er avril 2007, une autre tempête de sable arriva du désert de Kubuqi, le septième désert de Chine et sema le chaos dans la péninsule Coréenne. Ces tempêtes sont d’autant plus dramatiques qu’elles véhiculent également une grande quantité de polluants, issus des industries de l’est de la Chine, qui engendrent des maladies respiratoires et cutanées et qui déséquilibrent les activités agricoles.

Le désert de Kubuqi, en Mongolie intérieure, n’est un désert que depuis 30 années : c’était auparavant une zone de verts pâturages pour les Mongols et leurs troupeaux.

La Chine livre une bataille, qui est perdue d’avance sans doute, contre l’avancée des déserts, les anciens et les nouveaux qui se créent. Selon Wang Tao, de l’Académie Nationale des Sciences de Chine, ce sont 24 000 villages recouverts par les sables, qui ont été abandonnés, totalement ou partiellement, durant la seconde moitié du siècle passé. De 1950 à 1975, la Chine perdait chaque année 175 000 hectares. Entre 1975 et 1987, la désertification s’empara de 200 000 hectares par année. De 1987 à 2000, la désertification s’empara de 300 000 hectares par année. A ce rythme là, la Chine perdra 400 000 hectares de terre par année à partir de 2012.

En Chine, les tempêtes de sable s’aggravent en précocité dans la saison, en intensité et en nombre, au fil des années. Elles sont devenues une des principales calamités de ce pays. En 2006, elles affectèrent la qualité de l’air dans la moitié des grandes cités chinoises. Elles couvrirent 4 millions de kilomètres carrés, le double de la surface de l’année précédente.

Le 20 avril 2006, une tempête recouvrit la capitale chinoise de 300 000 tonnes de sable et de poussière.

Cette année, au Tibet, les tempêtes de sable arrivent avec deux mois d’avance sur la saison normale.

Au vu des méfaits sans cesse croissants de l’agriculture industrielle et militarisée, au vu des bouleversements climatiques (quelles qu’en soient les causes), l’érosion éolienne va s’intensifier en Afrique et en Asie et va revenir en Amérique du nord.

Les tempêtes d’humus ne sont plus trop à craindre sur certains continents car une grande partie de l’humus est déjà au fond des océans, grâce aux pratiques barbares de l’agriculture moderne. Ce sont les tempêtes de sable qui vont devenir une des plus grandes calamités de notre planète. Demain.

La planète abandonnée aux déserts

Selon le Professeur Pimentel, de 1956 à 1996, ce sont 1,5 milliard d’hectares de terre arable qui ont été abandonnés en raison de l’érosion. Cela représente un tiers des surfaces arables de la planète.

Au cours des 20 dernières années, environ 300 millions d’hectares (six fois la surface de la France) de forêt tropicales, ont été détruits pour implanter des domaines fermiers et des pâturages ou des plantations à grande échelle d’huile de palme, de caoutchouc, de soja, de canne à sucre et autres récoltes.

A l’échelle planétaire, ce sont 1370 hectares de sol qui sont désertifiés à jamais toutes les heures, ce qui fait 12 millions d’hectares chaque année, l’équivalent de la moitié de la surface agricole de la France.

Desert au cœur des USA
Desert au cœur des USA

En Inde, par exemple, ce sont 2,5 millions d’hectares qui sont désertifiés chaque année. Vers 2000, on estimait à 150 millions d’hectares la surface agricole de ce pays. Cela signifie qu’en 2060, il ne restera plus un gramme de terre arable en Inde. En fait, un scénario plus catastrophique peut se profiler si le processus de désertification s’emballe, en raison des bouleversements climatiques : accroissement des températures, sécheresses et disparition des glaciers de l’Himalaya.

A l’échelle planétaire, quelle est la quantité exacte de sol perdu chaque année en raison de l’érosion éolienne et hydrique ? Les estimations les plus basses sont de l’ordre de 25 milliards de tonnes de sol par année. Selon les estimations les plus hautes, ce sont 2400 tonnes de sol, chaque seconde, qui partent dans le vent ou dans les océans, à savoir 76 milliards de tonnes de sol chaque année.

Les estimations hautes nous semblent beaucoup plus probables car chaque année Costa Rica perd 1 milliard de tonnes de sols, l’Ile de Java en perd un milliard, l’Ethiopie en perd un milliard, etc, etc.

Dans ses écrits, John Jeavons a évoqué la perte de sol en relation avec la production de nourriture : pour chaque tonne de nourriture produite, ce sont de 6 à 18 tonnes de sol qui sont irrémédiablement perdues.

Un occidental consomme à peu près une tonne de nourriture par an. Dans certains pays, la quantité consommée par personne est de moitié. Dans d’autres régions, ou selon les populations ou les couches sociales, la quantité de nourriture consommée tend vers le zéro, ce qui “explique” le fait que 36 000 personnes meurent de faim tous les jours.

En Chine, l’érosion serait maximale puisque le chiffre de 18 tonnes de sol perdues, par tonne de nourriture produite, est avancé. Les chiffres officiels évoquent la perte de 5 milliards de tonnes de sol chaque année dans ce pays. C’est une estimation strictement a minima. Selon les images de satellite, les déserts du Taklimakan et du Kumtag sont en train de fusionner. Il en est de même pour deux déserts du centre nord qui sont en train de s’étendre sur les provinces du Gansu et de la Mongolie.

En Iran, selon Mohammad Jarian, le responsable du département de lutte contre la désertification, ce sont 124 villages de la région de Sistan-Baluchistan qui ont été ensevelis en 2002 et abandonnés.

Dans le nord-ouest de l’Afghanistan, des dunes de sable de 15 mètres de hauteur envahissent tout et y compris les routes.

Au Nigeria, ce sont 350 000 hectares qui sont désertifiés chaque année, autant qu’en Chine. De 1950 à 2005, la population humaine y est passée de 33 millions à 132 millions tandis que le nombre de vaches, moutons et chèvres passait de 6 millions à 66 millions.

De nombreux pays d’Afrique sont désertifiés très rapidement en raison de différents facteurs : pratiques agricoles non durables, surpâturage et errance des troupeaux, feux de brousse et le commerce du charbon de bois à destination des citadins de plus en plus nombreux.

Madagascar perd jusqu’à 400 tonnes de sol par année et par hectare.

Au Mexique, la désertification chasse 700 000 paysans tous les ans vers les cités ou vers les USA.

Quant à l’Australie, parler de catastrophe n’est tout au plus qu’un euphémisme. Ce pays se prépare à sa septième année consécutive de sécheresse. L’Australie sera sans doute le premier pays dit “occidental” à être ruiné par les processus de salinisation et de désertification : certaines terres Australiennes ont des concentrations de sel trois fois supérieures à celles de l’océan.

Il aura fallu à la société occidentale un siècle et demi d’agriculture et d’élevage intensifs pour transformer l’Australie en un désert. Fast-food and fast-destruction ! Faut-il vous l’emballer ou est-ce pour “consumer” de suite ?

Un record que même les USA n’ont pas réussi à battre : ils n’ont perdu, en 150 ans de colonialisme, que 75% de leur humus !C’est 1m50 (150 cm) d’humus qui est parti à tout jamais dans les océans. En région tempérée, il faut 500 ans pour produire naturellement 2,5 cm d’humus. Cela veut dire qu’il faudra à la nature 30 000 années pour régénérer ce patrimoine humique aux USA.

Eu Europe, le taux moyen d’érosion du sol est de 17 tonnes par hectare et par année alors que le taux moyen de formation du sol est d’1 tonne par hectare et par année.

En France, par exemple, selon la Chambre d’Agriculture du Pas de Calais, les agriculteurs de ce département perdent entre 10 et 100 tonnes par hectare et par année.

Lorsque l’érosion est de 100 tonnes de sol par hectare et par an, cela signifie qu’il faut 100 ans pour réparer 1 année d’agriculture intensive betteravière et qu’il faut 2000 ans pour réparer 20 années d’agriculture intensive betteravière.

A l’érosion s’ajoute la destruction des sols brûlés par l’agriculture toxique. Ne nous méprenons pas : de nombreuses régions Françaises ne sont peut-être pas des déserts de sable mais elles sont des déserts en gestation. Que se passerait-il si, aujourd’hui, on interdisait en agriculture tous les intrants de synthèse et tous les pesticides ?

Les terres sont devenues stériles : les automnes seraient sans récolte.

L’agriculture occidentale moderne est une agriculture hors-sol produisant des aliments-poisons. C’est une agriculture militarisée qui bombarde le sol de tout un arsenal de produits toxiques.

Qui se rappelle que l’année 2006, en fait l’année passée, fut déclarée par l’ONU “Année internationale des déserts et de la désertification” ?

Qui connaît l’existence, au sein de l’ONU, d’une commission chargée de la lutte contre la désertification ? Peu de gens sans doute et c’est tout aussi bien car cette commission n’a aucun moyen financier ! Un léger brise-vent (de sable) tout au plus.

En 2050, que verra-t-on de la Planète Terre à partir du cosmos : de grands déserts entourés de quelques océans, une petite boule jaune et bleue. Le vert aura disparu. Après-demain.

Pénurie d'eau

Il existe une “Journée Mondiale de l’Eau” comme il existe une journée mondiale des femmes, une journée mondiale de l’enfance et peut-être bientôt une journée mondiale de l’humus ou une journée mondiale des vers de terre !

C’est l’occasion, pour tous les hypocrites, de lâcher quelques larmes de crocodiles sur le sort des femmes, sur le sort de l’eau, sur le sort des enfants, bref sur le sort de tous les opprimés.

Cette année, le thème de cette journée mondiale de l’eau était “Faire face à la pénurie d’eau”. La pénurie va bientôt conférer à cette nouvelle opprimée le statut d’eau primée. L’eau bientôt plus chère que le pétrole (ce qui va ruiner tous les espoirs des inventeurs de moteurs à eau) ou plus chère que le vin (ce qui va aggraver les dégâts de l’alcoolisme) ?

Bref, selon la FAO, la pénurie en eau représente l’enjeu du 21ème siècle« L’enjeu réside essentiellement dans la nécessité de trouver des moyens plus efficaces de conserver, d’utiliser et de protéger les ressources en eau de la terre. »

Cela ne fait que quelques dizaines d’années que l’on entend ce type de discours creux.

Aujourd’hui, et cela ne date pas d’hier, ce sont 2,6 milliards d’humains qui sont sans assainissement, et ce sont 1,3 milliards d’humains qui sont sans accès à l’eau potable. Tous les ans, 2 millions d’enfants de moins de cinq ans meurent de maladies diarrhéiques liées au manque d’eau potable.

Parlons d’argent et évoquons quelques chiffres. Il existe un « Fonds pour l’environnement mondial » (FEM) qui comme l’ONU le déclare « a été établi en 1990 dans le but de fournir des ressources financières supplémentaires pour traiter les questions environnementales mondiales des pays en développement et des économies en transition. » Ce fonds ne dispose que de 2 milliards de dollars par an, pour toute la planète.

Il faudrait, par exemple, investir 1,5 milliard de dollars pendant 10 ans pour que les 300 millions d’Africains, qui n’ont pas d’eau potable, puissent y accéder et pour que 80% d’entre eux puissent accéder à l’assainissement.

En comparaison, tous les ans, les pays occidentaux subventionnent leur agriculture à hauteur de 350 milliards de dollars. Et tous les ans, les dépenses militaires mondiales sont de l’ordre de 900 milliards de dollars.

Culture de maïs dans l’Iowa aux US
Culture de maïs dans l'Iowa aux US

Il faut se rendre à l’évidence : la communauté internationale a décidé de laisser mourir de soif, ou de maladies liées à des eaux souillées, toute une partie de l’humanité.

Les voeux pieux et les discours pleurnichards des institutions internationales ne sont que des paravents.

Et cela se comprend. C’est une question de survie pour les nantis. C’est une question de survie pour leur agriculture moderne qui consomme quasiment 90 % de l’eau douce de toute la planète.

Le choix est simple : ou on donne de l’eau à toute l’humanité ou on tente de faire perdurer l’agriculture moderne non durable. Les nantis qui contrôlent la planète ont décidé de privilégier l’agriculture des riches.

L’agriculture moderne non seulement désertifie les sols, non seulement empoisonne les humains et les animaux mais en plus, elle épuise les réserves d’eau douce..

Les variétés modernes de maïs sont la quintessence de ce délire agricole. Un hectare de maïs requiert, aux USA, au moins 5 millions de litres d’eau mais en raison de l’évaporation, ce sont 8 millions de litres d’eau qu’il faut amener par hectare. Ce qui fait 1000 litres d’eau par kilo de maïs produit, et encore ce n’est qu’une moyenne car certaines études évoquent jusqu’à 1500 litres d’eau par kilo de maïs.

Il faut bien préciser que ce gaspillage éhonté de l’eau douce pour la culture du maïs n’est pas lié à la nature du maïs qui est une plante C4, à savoir une plante résistante à la sécheresseLes variétés de maïs traditionnelles pouvaient croître dans les déserts du Mexique ou de l’Arizona. Les Hopis, par exemple, semaient leur maïs à 30 ou 40 cm de profondeur dans le sable du désert avec des bâtons à semer. C’est l’agronomie moderne qui a fait du maïs une pompe à eau. Et comme les réserves d’eau sont en train de baisser sur toute la planète, les apprentis-sorciers du bricolage génétique nous promettent de nouvelles variétés de maïs chimériques résistantes à la sécheresse. La boucle est bouclée.

Le maïs constitue en France la principale culture irriguée et ce surtout dans le sud-ouest. Mais elle n’est pas la seule : le blé, la betterave, la vigne, la prairie, etc, sont également irrigués.

Voici quelques estimations, quant à la quantité d’eau nécessaire pour l’agriculture US, données par le très réputé Professeur Pimentel, de l’Université de Cornell, dans son ouvrage : “ Ecological Integrity : Integrating Environment, Conservation and Health” (Island Press, Washington DC, 2001).

Camp de concentration dans le Colorado accueillant des dizaines de milliers de vaches.
Camp de concentration dans le Colorado accueillant des dizaines de milliers de vaches.

Camp de concentration dans le Colorado accueillant des dizaines de milliers de vaches.

  •  Pour 1 kilo de pommes de terre : 500 litres d’eau
  • Pour 1 kilo de blé : 900 litres d’eau
  • Pour 1 kilo de fourrage : 1000 litres d’eau
  • Pour 1 kilo de maïs : 1500 litres d’eau
  • Pour 1 kilo de riz : 1900 litres d’eau
  • Pour 1 kilo de soja : 2000 litres d’eau
  • Pour 1 kilo de viande de boeuf : 100 300 litres d’eau

Dans le catalogue des folies agricoles irriguées, la production de viande détient ainsi la palme de la non-durabilité et du gaspillage.

La consommation de viande, au niveau planétaire, rappelons-le, est passée de 44 millions de tonnes en 1950 à 265 millions de tonnes en 2005. Et cette tendance ne fait que s’amplifier.

La quantité d’eau utilisée par kilo de viande diverge en fonction des études.

Selon Georg Borgstrom, de l’Université du Michigan, il faut “seulement” 21 000 litres d’eau pour produire 1 kilo de viande de boeuf.

Selon l’Université de Californie, il faut 44 000 litres d’eau pour produire 1 kilo de viande de boeuf, 13 700 litres d’eau pour produire 1 kilo de viande porc et 6 800 litres d’eau pour produire 1 kilo de viande de poulet.

Une étude publiée par une commission des Nations Unies en 2004 rapporte le chiffre de 70 000 litres d’eau par kilo de viande de boeuf.

Ce chiffre n’est pas très éloigné de celui du Professeur David Pimentel dont les calculs sont fondés sur la nourriture moyenne d’un boeuf aux USA, à savoir 100 kilos de fourrage et 4 kilos de grain par kilo de viande produite.

Aux USA, 65 % des productions agricoles sont destinées à nourrir le bétail (contre 1 % en Inde !).

Sur le plan mondial, la production de grains est de 1985 millions de tonnes dont 60 % sont consommés par l’homme, 36 % sont utilisés comme aliment pour le bétail et 3 % sont brûlés comme fuel.

Si on raisonne en termes de calories, il faut 50 fois plus d’eau pour produire une calorie de viande qu’une calorie de pomme de terre.

Raisonnons maintenant en termes de douche. Admettons que l’on prenne tous les jours une douche de 5 minutes à raison d’un flux de 18 litres d’eau par minute. Quel est l’équivalent d’un kilo de viande de boeuf, selon les calculs du Professeur Pimentel, en termes de douches ?

Trois années de douches quotidiennes équivalent à 1 kilo de viande de boeuf !

Ces quelques chiffres nous aident à mieux comprendre le dilemme de la planète que l’on pourrait (presque) résumer comme un choix entre l’eau pour les pauvres et de la viande pour les riches.

Le dilemme se complexifie, en fait, car les riches, maintenant, non seulement veulent de la viande, et encore plus de viande, mais ils veulent aussi des agro-carburants pour faire rouler leurs voitures.

La folie des nécro-carburants est ainsi en train de se répandre comme une peste sur toute la planète. Elle accentue d’autant plus la pénurie de l’eau car il faut jusqu’à 3600 litres d’eau pour produire un litre d’éthanol (à partir de 2,5 kilos de maïs). En 2006, aux USA, 20 % de la production nationale de maïs (à savoir 55 millions sur les 270 millions de tonnes produites) a été brûlée dans les centrales à éthanol.

Encore plus de pénurie d'eau

Le bilan de l’agriculture moderne est encore pire que ce que l’on peut imaginer car ce ne sont que les effets directs que nous venons de décrire.

Il nous faut maintenant aborder les conséquences indirectes de cette agriculture non-durable sur la gestion des eaux.

Le premier aspect concerne la destruction de la couverture végétale dans les grandes plaines, en particulier dans le passé aux USA et en Australie et plus récemment dans des pays comme le Kazakhstan. Aux USA, un nouveau concept agronomique, aussi insensé que celui de la “vigueur hybride”, vit le jour dans les années 1860-1870. Selon ce concept, la pluie allait suivre la charrue, à savoir que la destruction de la couverture végétale des grandes plaines allait augmenter le régime des pluies.

N’importe quel enfant d’une tribu d’Amérindiens aurait pu prouver aux agronomes US qu’ils avaient complètement perdu la raison. Les cycles de sécheresse et de tempêtes de sable, dont le “Dust Bowl”, eurent raison de ce délire laboureur quasi mystique. Mais les dégâts furent considérables.

Le second aspect, souvent lié au premier, concerne la destruction de l’humus dans le sol. La perte d’humus fait du sol une vraie passoire, ou une chape de béton sur laquelle tout ruisselle, en fonction de la nature des sols. En bref, les sols de l’agriculture moderne ont perdu toute capacité de rétention équilibrée de l’eau pour une croissance harmonieuse des plantes alimentaires. Ce problème est d’autant plus aggravé que les populations de vers de terre ont été décimées par des dizaines d’années d’agriculture mécanisée et toxique.

L’irrigation intensive des cultures n’existe que parce que la structure des sols a été complètement détruite et parce qu’aussi, l’industrie a inventé des arroseurs mécaniques. L’irrigation intensive des terres agricoles provoque, soit dit en passant, un énorme problème de salinisation sur toute la planète.

Le troisième aspect est lié à la déforestation. Les 300 millions d’hectares de forêts tropicales qui ont été détruits durant ces 20 dernières années, l’ont été en grande partie pour des productions agricoles. C’est une catastrophe planétaire car les forêts sont non seulement un poumon mais une immense réserve d’eau.

L’arbre, par essence, appelle la pluie. Et quand la pluie vient, elle percole sans aucun ruissellement.

La déforestation chasse la pluie et amène la sécheresse. Et si jamais la pluie vient, elle ne percole plus, elle ne fait que ruisseler et générer des inondations qui aggravent l’érosion des sols. C’est un cercle vicieux.

Et cela ne va pas être aisé de sortir de ce cercle vicieux en raison des bouleversements climatiques qui sèment le chaos sur la planète depuis plusieurs années et qui augmentent en sévérité. Ces bouleversements n’auraient peut-être pas été aussi “bouleversants” si les écosystèmes naturels avaient été respectés, et si les activités agricoles avaient été gérées harmonieusement.

Il est trop tard et la planète a épuisé sa capacité de prendre des coups sans réagir.

Les grands glaciers planétaires sont en train de fondre. Au mois d’avril 2007, l’Inde était complètement bouleversée d’apprendre que, peut-être, dès 2025, tous les glaciers de l’Himalaya auraientdisparu. Les glaciers de l’Himalaya sont la source de 7 grands fleuves : le Gange, l’Indus, le Brahmaputra, le Mekong, le Thanlwin, le Yangtze et le Fleuve Jaune. La fonte des glaciers va tout d’abord provoquer d’immenses inondations ainsi que des glissements de terrains catastrophiques et ensuite générer une impitoyable pénurie d’eau.

Les gouvernements évoquent, à moyen terme, de déplacer des centaines de millions de leurs paysans. Ce qui est parler pour ne rien dire et juste pour amuser les journalistes. Les déplacer vers quel ailleurs ? Surtout si la montée des océans recouvrent les grands deltas et une bonne partie du Bangladesh.

Le problème se pose de la même façon en Amérique du sud. La fonte totale des glaciers des Andes pourrait rendre totalement inhabitable une grande partie de ce continent.

Les glaciers, en fait, constituaient auparavant 70 % de la réserve d’eau douce de la planète. Leur disparition sur tous les continents va provoquer d’énormes catastrophes dont il est très difficile d’imaginer la nature.

Finissons par une note d’optimisme, une petite cerise sur le gâteau de sable : en France, malgré 70 ans de chimie intensive sur les terres agricoles, toutes les réserves d’eau Françaises ne sont pas encore irrémédiablement polluées !! Cela s’arrose !

En effet, selon les enquêtes publiées par l’IFEN en 2005, 96% “seulement” de nos cours d’eaux et 61% “seulement” de nos nappes phréatiques sont pollués par “seulement” 230 pesticides : la molécule la plus présente étant l’atrazine qui génère cancers (du sein et des ovaires), maladies cardio-vasculaires, dégénérescences musculaires, lésions des poumons et des reins, etc.

Aux USA et au Canada, des études sérieuses ont mis en évidence la présence, dans les eaux, de très nombreuses substances : estrone, ethinylestradiol (venant des pilules contraceptives), des anti-inflammatoires, des remèdes contre le cancer, des tranquillisants, etc. Aux USA, chaque année un million de patients cancéreux sont traités par chimiothérapie. Ces patients génèrent approximativement, chaque année, 650 000 tonnes d’excréments qui sont évacuées dans les égouts. Des chercheurs se sont aperçus que toutes les substances utilisées en chimiothérapie sortaient intactes des systèmes de retraitement d’eau. Toutes ces substances sont mutagènes, carcinogènes, tératogènes et embryotoxiques.

Au Canada, en 1998, deux chercheurs, White et Rasmussen, ont calculé que la génotoxicité présente dans l’unité de retraitement des eaux usées de Montréal d’une part et dans le St Laurent d’autre part étaient seulement imputables à l’industrie à hauteur respectivement de 15 % et de 10 %. Tout le reste avait une origine “mystérieuse”, selon leurs commentaires. En 2005, en Suisse, une thèse de doctorat a porté sur la contamination de l’environnement par les substances pharmaceutiques. (recherche de Tauxe Würsch, Annick ; Tarradellas, Joseph).

«Dans la première partie de cette recherche, la présence et le devenir de cinq médicaments très utilisés (Acide Clofibrique, Ibuprofène, Kétoprofène, Acide Méfénamique et Diclofénac) ont été analysés dans trois STEPs durant quatre à sept jours consécutifs. L’Ibuprofène, le Kétoprofène, l’Acide Méfénamique et le Diclofénac sont des anti-inflammatoires (NSAIDs). L’Ibuprofène et l’Acide Méfénamique sont les médicaments les plus vendus de cette étude : 17 tonnes par an et par substance en Suisse. L’Acide Clofibrique est un métabolite du clofibrate, de l’étofibrate et du clofibrate d’étofylline. Ces substances hypolipémiantes sont utilisées pour abaisser les concentrations plasmatiques élevées de cholestérol et de triglycérides. La méthode analytique développée pour analyser ces cinq médicaments permet de récupérer généralement plus de 70% de ces composés. Les limites de détection (5-15 ng/l) permettent la détection de ces substances dans les échantillons d’eaux usées.

Les résultats de l’analyse des échantillons montrent que ces cinq substances étaient persistantes et se retrouvaient dans les effluents des STEPs …»

En conclusion, au bout du compte qui va trinquer ? Nous sommes en pleine pénurie d’eau et ce qui reste d’eau peut difficilement mériter le qualificatif de H2O !

L’eau de boisson, l’eau d’irrigation, est devenue un dangereux cocktail de pesticides, de produits pharmaceutiques et de résidus industriels.

Et pour couronner le tout, l’eau, bien précieux et bien collectif de l’humanité, est devenue une affaire privée dans les griffes de quelques multinationales mafieuses.

Voleurs d’eau, Voleurs de terre, Pollueurs d’eau, Pollueurs de terre, ce sont les mêmes !

Planète terre : planète désert ?

Les seigneurs des anneaux
Les seigneurs des anneaux

Sur la planète Dune, les grands vers sont les Seigneurs des déserts. Ils sont la source unique de l’Epice, le Mélange de longévité. Grâce à sa fournaise interne de digestion, un grand ver de 200 mètres peut générer dans l’atmosphère autant d’oxygène qu’une surface couverte de végétation sur dix kilomètres carrés.

Sur la planète Terre, les petits vers sont les Seigneurs des Anneaux ! Ils sont l’intestin et le grand recycleur de notre planète et Darwin passa les dernières années de sa vie à les étudier. Il en existe plus de 3600 espèces répertoriées au monde (dont 350 espèces en Europe). Cependant, il est estimé que le nombre réel d’espèces peut atteindre 7000 ou même 10 000. Ils peuvent vivre jusqu’à 15 ans.

Les quelques espèces géantes (de 60 cm à 1 mètre de longueur) qui existaient en Oregon aux USA, Driloreirus americanus et Driloreirus macelfreshi, ont totalement disparu. Ces grands vers blancs exsudaient une substance au parfum de lys. Une espèce de ver géant subsiste encore en Australie. Megascolides australis peut atteindre 1 mètre de longueur et 3 mètres de longueur en s’étirant.

Les vers de terre peuvent abonder dans des terres fertiles et saines. Une prairie permanente non traitée peut en compter de 150 à 400 par mètre carré, à savoir d’1,5 à 4 millions d’individus par hectare, ce qui représente une masse d’1 à 3 tonnes de vers par hectare.

En comparaison, un vignoble ou un champ de céréales maltraités par l’agriculture industrielle et toxique n’en contient que d’un à trois individus par mètre carré. A savoir 130 fois moins.

Les vers de terre sont la clé de la fertilité des sols. Ils sont de trois types :

  • Les Epigés (les plus petits, de 1 à 5 cm de longueur) travaillent en surface à digérer le couvert végétal.
  • Les Endogés (les vers de taille moyenne, de 1 à 20 cm de longueur) sont sous terre et se nourrissent de matière organique déjà décomposée. Ils peuvent creuser jusqu’à 500 mètres de galeries par mètre carré. Ils représentent 20 à 50% de la biomasse des terres fertiles.
  • Les anéciques (les plus grands vers qui font de 10 cm à 1 mètre de longueur) vivent dans le sous-sol et peuvent creuser des galeries verticales de trois mètres de profondeur. En Europe tempérée, ils représentent 80 % de la masse totale des vers de terre.

Les vers de terre sont de grands laboureurs : ils enfouissent dans les couches profondes du sol les éléments organiques qu’ils ont prélevés et fragmentés en surface et remontent à la surface la terre des couches profondes ingérée en même temps que les matières organiques.

Les vers de terre sont de grands aérateurs : ils peuvent creuser jusqu’à 5000 km de galeries par hectare, ce qui représente une surface de contact équivalente à 5 hectares.

Les vers de terre sont de grands percolateurs : toutes les eaux de pluie, y compris de violentes pluies d’orages, (jusqu’à 160 mm d’eau par heure) peuvent être absorbées par le sol grâce à ce même travail d’élaboration de galeries.

Les vers de terre sont de grands digesteurs : une biomasse moyenne de vers de terre (environ une tonne par hectare) ingère, en une année, 400 tonnes par hectare de terre et de matière organique (jusqu’à 1 000 tonnes dans les zones tropicales).

Les vers de terre sont, ainsi, de grands régulateurs biologiques du sol, grâce à leur grande capacité d’interaction avec les micro-organismes. Ils produisent du mucus (qui est un substrat organique très énergétique) qu’ils mélangent dans leur tube digestif avec le sol ingéré (qui contient des particules minérales, organiques, et de la microflore) et de l’eau. Leur système digestif mutualiste crée ainsi un milieu idéal pour les bactéries dormantes dans le sol ingéré : elles réactivent leurs capacités enzymatiques et digèrent la matière organique. Leurs déjections constituent ensuite des complexes organominéraux stables. Certaines espèces de vers de terre produisent des phytohormones qui vont favoriser la croissance des plantes. Les vers de terre peuvent également annihiler l’effet négatif des nématodes phytoparasites sur le rendement des cultures

Les vers de terre, source par excellence de fertilité, ont “déserté” les terres agricoles qui sont devenues les poubelles toxiques de l’agro-industrie. Quel pourcentage de vers subsiste dans les terres agricoles françaises, par exemple ? Le calcul est simple. Comme l’agriculture biologique ne représente que 2 % des surfaces et que les vers de terre ne survivent pas dans les terres massacrées par l’agro-chimie, ce sont donc 98 % des vers de terre qui ont disparu.

Cette agriculture intensive et industrielle les a détruits de quatre façons :

  • par le labour : les lames de charrue les déchiquettent et le retournement du sol les exposent à de très nombreux prédateurs à la surface.
  • par le passage d’engins agricoles excessivement lourds qui tassent et asphyxient les sols.
  • par la faim : ils sont, en effet, affamés par le manque d’apport de matière organique.
  • par tous les poisons répandus par les multinationales biocidaires : pesticides et intrants de synthèse.

Les vers de terre sont d’ailleurs de puissants concentrateurs de poisons. Ils peuvent concentrer le plomb à des teneurs de plusieurs dizaines de fois supérieures à celles du sol et le DDT à des teneurs 150 fois supérieures à celles du sol.

Peut-être les grands mafieux de l’agro-chimie sont-ils en train de concocter, dans leurs laboratoires secrets, des vers de terre transgéniques résistants au DDT, à l’atrazine, au glyphosate, à l’endosulphon, etc ? Des petits vers de terre chimériques pour l’agriculture durable à la sauce Monsanto ?

Tsunamis alimentaires

Au risque de nous répéter, répétons-le cependant : tous les jours, 36 000 personnes meurent de faim, dont 2/3 sont des enfants. Mourir de faim signifie ne pas avoir assez à manger. Comme le dirait un célèbre présidentiable, ces enfants sont peut-être programmés génétiquement pour mourir de faim ? La mort par faim est-elle une erreur du programme génétique de l’humanité ?

On trouve encore dans des livres d’école des commentaires moralisateurs sur la décadence de la civilisation Aztèque qui sacrifiait quelques victimes sur ses autels de pierre.

La mort quotidienne de faim de 36 000 personnes n’est-elle pas un grand sacrifice collectif mis en place par la société décadente des riches et toléré par les institutions internationales ?

Le directeur de la FAO, Jacques Diouf, avait même un jour confié que son organisation pourrait solutionner la moitié du problème de la faim et de la malnutrition dans le monde avec seulement l’équivalent de deux semaines de dépenses militaires US, à savoir une petite vingtaine de milliards de dollars.

Donc, nous allons évoquer maintenant les surfaces arables disponibles pour la production de nourriture, mais sans illusion.

Les dés sont pipés : il n’y a aucune volonté de solutionner ce problème planétaire et on serait même enclin à penser qu’il y aurait plutôt une volonté affirmée de vider quelques continents de leur humanité. Après tout, l’Afrique est immensément riche dans son sous-sol : du zinc, de l’uranium, du pétrole, des diamants, du nickel … Et pour l’extraction, les machines conviennent parfaitement.

Selon la FAO, la surface moyenne de terre arable par habitant était de 0,32 hectare en 1961/1963 (pour une population mondiale de 3,2 milliards), de 0,21 hectare en 1997/1999 (pour une population mondiale de 6 milliards) et sera de 0,16 hectare en 2030 (pour une population mondiale estimée à 8,3 milliards).

Selon certains experts indépendants, les projections ci-dessus sont hautement optimistes car la surface moyenne de terre arable par habitant dans les pays pauvres sera seulement de 0,09 hectare en 2014. Elle n’était déjà que de 0,08 hectare en 1996 en Chine.

Quel est l’état de la production de grains à l’échelle planétaire ? Un mauvais état.

L’an passé, l’Australie n’a produit que 10 millions de tonnes de blé au lieu des 21 millions escomptées. En 2007, la situation s’empire pour ce pays. Le premier ministre Australien John Howard, qui ne croit pas au réchauffement climatique, a déclaré en fin avril que les agriculteurs du bassin Murray-Darling seraient privés d’eau d’irrigation s’il ne pleut pas en mai. Ce bassin concentre normalement 70 % des ressources en eau d’irrigation du pays et il produit 40 % de la nourriture pour l’Australie. Au printemps 2007, le flux d’eau de ce bassin est seulement le quart de la plus mauvaise année enregistrée.

En Chine, ces dernières années, la production de blé est tombée en-dessous de 100 millions de tonnes alors qu’elle avait été de 127 millions de tonnes en 1997. Cette baisse est imputable à la pénurie en eau.

En fait, les pays grands producteurs de grains, les USA, la Chine, l’Inde, l’Australie, la France sont confrontés à de graves pénuries d’eau. Dans le sud-ouest de la France, des agriculteurs abandonnent la culture du maïs irrigué.

Au niveau mondial, les stocks sont au plus bas depuis 35 années. Ils étaient de 57 jours à fin 2006. Les cours des denrées alimentaires flambent. Aux USA, 115 % d’augmentation pour le maïs en 15 mois.

Soyons réalistes, la Planète Terre continuera bien à nourrir une petite partie (de plus en plus restreinte) de la population humaine jusqu’en l’an 2050. Après quoi, rideau : changement de décor. Et c’est un scénario optimiste (quant à l’échéance dans le temps) car il ne prend en compte ni l’accroissement de la population mondiale, ni la montée des niveaux des océans, ni les bouleversements climatiques que tout un chacun peut commencer à observer, ni bien sûr un emballement climatique que personne n’ose imaginer.

Ce scénario “optimiste” ne prend pas en compte non plus, bien sûr, la grande supercherie des agro-carburants que nous venons de dénoncer dans notre article Mettez du sang dans votre moteur : la tragédie des nécro-carburants.

Ces agro-carburants vont générer une accélération de la déforestation : l’Indonésie, par exemple, envisage de détruire 16 millions d’hectares de forêts pour les remplacer par du palmier à huile (bientôt transgénique). Une telle monoculture constitue la première phase du processus de désertification car un sol tropical découvert devient à très court terme un désert. L’Indonésie détient d’ailleurs le record du monde de la déforestation avec 1,8 millions d’hectares par an, ou 205 hectares par heure.

Selon des scénarios résolument pessimistes, ou tout simplement, en fait, réalistes, de grandes crises alimentaires vont se profiler dès l’année prochaine et peut-être même dès cette année. Les températures ne cessent de grimper : certains agronomes estiment qu’une augmentation d’un degré celsius peut provoquer une baisse de rendement de 10 % dans les céréales.

Toutes les anciennes variétés agricoles, qui se caractérisaient par une très grande résilience, ont été éradiquées par les multinationales de l’agro-chimie et de l’agro-alimentaire et leurs complices dans les appareils d’état. Sauve qui peut les anciennes variétés ! !

Le Titanic agricole est en train de sombrer et c’est un tsunami alimentaire qu’il va provoquer. L’an prochain ou peut-être demain.

Le monothéisme : une erreur de programme génétique ?

Une civilisation qui détruit ses semences, qui détruit ses sols, qui détruit ses eaux, qui détruit ses enfants, c’est une civilisation en train de mourir. La civilisation occidentale est moribonde. Va-t-elle entraîner le reste de l’humanité et tous les écosystèmes dans son sillage ?

Dans le passé de l’humanité, de nombreuses civilisations ont émergé et puis disparu, parfois à la suite de la désertification de leurs terres. Ce qui caractérise notre civilisation occidentale, cependant, c’est sa capacité à détruire tout ce qu’elle touche. Elle génère un désert d’amplitude planétaire.

Il est fort intéressant de percevoir que les trois religions monothéistes sont nées du désert.

Depuis 2000 ans, le monothéisme a généré, en de nombreuses contrées, un désert culturel : hors du monothéisme, point de salut. Il n’est pas dans notre propos, ici, de débattre des différences entre ces trois courants monothéistes et de débattre de leur participation respective aux fondements de la société occidentale et de leur responsabilité respective dans l’aggravation du cauchemar écologique que nous infligeons présentement à la sphère planétaire.

Nous souhaitons juste souligner que la société occidentale est née du désert et qu’elle retourne aujourd’hui au désert pour mourir. Malheureusement, elle ne retourne pas au désert, berceau de ses origines : c’est toute la Planète Terre qu’elle transforme inexorablement en un désert mortuaire.

Pour les fondateurs de la société occidentale, le désert n’était pas valorisé en tant qu’écosystème. C’était juste un vide, l’idéalisation d’un état de désengagement, d’aliénation, un symbole de la nature de l’esprit humain. C’est la société occidentale qui a inventé l’histoire écrite avec tous ses avatars d’évolution, de temps linéaire, de progrès, de croissance. C’est la société occidentale qui a sombré dans la folie de la croissance illimitée sur une planète finie, sur une planète limitée. Sans doute parce que ses racines sont empreintes justement d’aliénation, dans le sens d’une coupure totale d’avec le milieu ambiant, dans le sens d’un irrespect total de la Nature, dans le sens d’un abandon total des connections avec le Cosmos. Désert, desertus, deserere, abandonner.

Peut-on dire avec David Miller que le monothéisme engendre d’un point de vue social le fascisme, l’impérialisme, le capitalisme ; engendre d’un point de vue philosophique la dualité, la dichotomie et la non-diversité ; engendre d’un point de vue psychologique des conceptions rigides, linéaires et figées ? Et nous pourrions peut-être ajouter que le monothéisme engendre d’un point de vue agricole la monoculture, la monoalimentation, la destruction de la diversité biologique. En fait, le monothéisme ne serait-il pas la négation même de la Vie ? La relation entre le monothéisme et le désert reste un sujet fascinant à explorer. Car le désert a aussi engendré de magnifiques civilisations, tels les Chacos dans le sud-ouest des USA, qui n’ont pas sombré dans l’impérialisme. Les Aborigènes ont survécu dans le désert Australien pendant 40 000 années et ont été détruits en peu d’années par les colons blancs qui ont détruit également tous les écosystèmes.

Peut-être la mission de l’humanité future et survivante sera-t-elle de réapprivoiser le désert ?


Article Rédigé le 3 mai 2007 par Dominique Guillet

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Dominique Guillet président de l'association Kokopelli