Le GNIS législateur : ça ne peut plus durer !

Communiqué de Kokopelli

Le GNIS législateur : ça ne peut plus durer !

Lors de l’émission récente, sur France Inter1, réunissant le GNIS2, l’association Pro-maïs, l’association Kokopelli, et Christophe Bonneuil, chercheur à l’INRA, Monsieur Burgaud, Directeur de Communication au GNIS, a répété, à plusieurs reprises, que chacun en France était « libre de semer ce qu’il voulait » ( !)

C’est une contre-vérité, bien entendu, et Monsieur Burgaud s’est beaucoup amusé à jouer sur les mots, puisque chacun sait qu’en dehors du Catalogue Officiel il est interdit de vendre, échanger ou donner, à titre onéreux ou gratuit, toute semence ou matériel de reproduction végétal. Nous sommes fort aise, malgré tout, de constater que, dans l’esprit du GNIS également, cette situation semble absurde et qu’il serait grand temps de permettre aux paysans de recouvrer un peu de leur liberté…

En revanche, il est une chose sur laquelle nous voudrions faire la plus grande lumière :

Monsieur Burgaud a prétendu que le GNIS n’avait pas le pouvoir d’écrire les textes qui régissent la profession. Pourtant, l’article 3, al. 5 de la loi du 11 octobre 1941, qui, sous Vichy, a créé le GNIS, rend les propositions du GNIS « obligatoires pour tous les membres des professions intéressées dès qu’elles ont reçu, selon le cas, l’acquiescement du ministre d’Etat à l’agriculture ou du commissaire du gouvernement ».

Ce cadre juridique, il faut en convenir, permet pourtant bien à la profession de transformer ses désirs réglementaires en réalité, avec l’aval et l’autorité de l’Etat.

Mais ce n’est pas tout : une vaste réforme de la législation européenne sur le commerce des semences est actuellement en cours. Or qui, dans les bureaux de la Commission Européenne, rédige, conjointement avec quelques fonctionnaires européens, la proposition législative ?

Madame Isabelle Clément-Nissou, Directrice des Relations Internationales du GNIS, et détachée par le Ministère de l’Agriculture français en tant qu’ « expert national » !

Dans ce contexte, il n’est pas étonnant que le lobby semencier installé à Bruxelles, l’ESA (European Seed Association) se soit déclaré « très satisfait » de la proposition législative présentée par la Commission Européenne le 17 janvier dernier…

Mais pourquoi ce mélange des genres ? Quel est exactement le rôle du GNIS ?

Cet organisme, qui regroupe exclusivement des professionnels privés de la filière semences présente toutes les caractéristiques d’un groupe de pression défendant les intérêts de l’industrie semencière.

Il se présente d’ailleurs officiellement comme le défenseur des « intérêts » de cette filière, et ne cache pas que l’une de ses missions est que « les législateurs européen et français prennent en compte les préoccupations de la filière (…) : biotechnologies et OGM, biodiversité, propriété intellectuelle et brevets, protection des semences et environnement », thème sur lesquels l’interprofession aurait dernièrement « accru ses actions d’information et de communication ».

De plus, le GNIS ne représente que les professionnels engagés dans la logique industrielle.

En effet, il ne regroupe en son sein que les « organisations professionnelles les plus représentatives », à l’exclusion de toutes celles, minoritaires, qui tentent de faire émerger une autre logique.

Malgré cela, et ignorant tout du concept de conflit d’intérêt, le législateur sous Vichy, puis le pouvoir réglementaire, lui ont confié des missions de représentation officielle de la France, en Europe et à l’international, d’élaboration de textes réglementaires et de conseil auprès du Ministère de l’Agriculture, une mission de contrôle et de certification de la production de semences auprès de ses propres membres (et souvent par ses propres membres), et, afin de boucler complètement la boucle de la consanguinité et de l’autocratie, une mission d’agent de répression des fraudes, pour sanctionner ceux qui ne voudraient pas admettre la légitimité d’un tel système !

Ce mélange des genres, qui institutionnalise les conflits d’intérêt, n’est pas admissible dans une société démocratique.

L’intérêt général, dans un contexte au surplus qui a vu l’expansion de l’industrie semencière se faire au dépends de la biodiversité, commande d’assurer la pluralité des opinions et la protection des intérêts minoritaires.

Ainsi le GNIS qui tient la plume du législateur, représente celui-ci, contrôle l’application de la loi et sanctionne ses contrevenants : ça ne peut plus durer !

Cette survivance du régime autoritaire de Vichy doit disparaître, une fois pour toutes.

Nous proposons le retrait immédiat du mandat de Madame Clément-Nissou, de même que la dissolution pure et simple du GNIS ou, à tout le moins, la suppression définitive de toutes ses prérogatives de puissance publique.

1 « Coup de semence : le business des graines, le champ des problèmes » – Service Public, par Guillaume Erner – émission du 4 janvier 2013 2 Groupement National Interprofessionnel des Semences, graines et plants (GNIS)

La liberté de semer, selon Stéphane Le Foll

Nous tenons à remercier tous les parlementaires français qui, ces derniers mois, se sont émus ou indignés de la décision récente de la Cour de Justice de l’Union Européenne et ont ainsi, de leur propre initiative, relayé auprès du Gouvernement, par des questions écrites ou orales, nos préoccupations et propositions.

Ce qui nous étonne, en revanche, c’est que Stéphane Le Foll, Ministre de l’Agriculture, a invariablement répondu à ces questions, sur un ton très encourageant, qu’il envisageait bien de rendre possible, pour les agriculteurs, le « triage à façon ».

Outre que nous émettons les plus vives réserves quant à l’intention réelle de M. Le Foll de rendre possible la semence de ferme, alors que la loi du 9 décembre 2011 qui rend celle-ci payante n’a pas été abrogée, le « triage à façon » n’a strictement aucun rapport avec la problématique de Kokopelli.

Mais il ne doit s’agir que d’un malentendu, de la part de notre Ministre PS. En effet, nous comptons bien sur celui-ci, dans le contexte urgent de réforme de la législation européenne sur le commerce des semences, pour donner une suite favorable à nos demandes présentées ci-dessus.

Ce n’est, dans tous les cas, pas notre Premier Ministre, M. Ayrault, qui le contredira sur ce point, puisque la ville de Nantes rehausse ses platebandes avec notre diversité. Et nous l’en remercions bien sincèrement ainsi que son proche collaborateur, M. Gilles Rettière, le maire de Rezé et le président de Nantes Métropole, en compagnie duquel Kokopelli coupera le ruban d’inauguration du salon bio de Rezé, Natura 2013, le 8 février prochain – Kokopelli étant le parrain du salon Natura cette année. Rappelons que M. Gilles Rettière avait fait voter à l’unanimité, il y a quelques années, un Voeu de soutien à l’Association Kokopelli par la ville de Rezé.

Remercions aussi Monsieur Jean Germain, Maire PS de la ville de Tours, qui, parmi tant d’autres communes de France, nous témoignent leur soutien.

Allez le PS, il y a encore tant à faire…

Les anciennes variétés françaises de maïs enfin accessibles ?

 Lors de l’émission radio évoquée ci-dessus, Monsieur Jean Beigbeder, vice-président de l’association Pro-Maïs, qui regroupe les sociétés Limagrain, Monsanto, Pioneer, Syngenta, et autres enfants de chœur, a soutenu opiniâtrement que les ressources génétiques françaises étaient accessibles à tout le monde, y compris aux agriculteurs, jardiniers amateurs et associations dissidentes.

Il s’est même personnellement engagé à faire parvenir à l’association Kokopelli, par lots de 600 grains, les 276 variétés anciennes de maïs que conserve le « Réseau de conservation des ressources génétiques du maïs », constitué de l’INRA et de l’association Pro-Maïs.

Nous avons donc fait une demande officielle et nous nous réjouissons dès maintenant de la réponse, assurément positive, qui nous sera réservée, nous permettant d’enrichir ainsi notre collection de maïs…

Nous vous engageons, agriculteurs et jardiniers passionnés de biodiversité, à en faire de même !

Pour cela, il suffit d’adresser une demande, par écrit ou par fax, à :

Madame Anne Zanetto INRA, UMR-DIAPC Domaine de Melgueil 34130 MAUGUIO.

fax: (33) 4 67 29 39 90

N’oubliez pas de joindre à votre demande 2 exemplaires signés de l’Accord de Transfert de Matériel, disponible ici.


Suite à notre communiqué intitulé « Le GNIS législateur : ça ne peut plus durer ! », le GNIS nous a aimablement demandé (par lettre recommandée avec AR) de publier sur notre site Internet quelques éléments de réponse, jugeant que Kokopelli faisait « une présentation inexacte du rôle, de l’organisation et du fonctionnement du Gnis ».

C’est avec plaisir que nous mettons la réponse du GNIS en ligne, laquelle apporte un éclairage intéressant sur sa conception de l’« exactitude ».

Confrontée à quelques éléments tangibles présentés ci-après, nous constaterons qu’il peut s’agir d’une notion très relative…

Nous nous réjouissons, en tout état de cause, de l’ouverture d’un débat fertile sur la place du GNIS dans le paysage institutionnel français.


Droit de réponse du GNIS

Le communiqué de Kokopelli récemment mis en ligne sur le site www.kokopelli-semences.fr sous le titre le « Gnis législateur : ça ne peut plus durer », fait une présentation inexacte du rôle, de l’organisation et du fonctionnement Gnis.

    • 1. L’affirmation prêtée au représentant du Gnis lors de la récente émission sur France Inter selon laquelle chacun est en France « libre de semer ce qu’il voulait », n’est pas une « contre-vérité ».La liberté de semer constitue la règle de droit commun qui n’est soumise qu’à la seule condition de ne pas reproduire une variété nouvelle protégée par un certificat d’obtention végétale qui n’a rien d’attentatoire à la liberté. Pour les variétés anciennes dans le domaine public, la liberté de semer est totale.Depuis la loi du 8 décembre 2011, la liberté de semer s’est élargie puisqu’elle s’étend maintenant aux variétés nouvelles protégées de 21 espèces pour lesquelles l’agriculteur peut utiliser des semences de ferme à la seule condition de rémunérer le sélectionneur pour son travail. La liberté de commercialiser est soumise à des règles européennes et nationales dont la légalité ne souffre aucune contestation comme le récent arrêt de la Cour de justice européenne rendu sur une question préjudicielle de Kokopelli, l’a confirmé. En l’état de ces règles, toute variété mise en marché doit être déclarée afin d’assurer la traçabilité de ce qui est commercialisé.
    • 2. Le Gnis n’est pas un « législateur ».La loi du 11 Octobre 1941 dont Kokopelli fait son antienne, a été abrogée par un décret de 1962, alors que le général de Gaulle était Président de la République, Georges Pompidou Premier ministre, et Edgar Pisani ministre de l’Agriculture. Seuls ont été maintenus en vigueur quelques alinéas de la loi de 1941.Le Gnis n’exerce aucun pouvoir réglementaire qui est de la seule et exclusive prérogative du ministre de l’Agriculture. La mission du Gnis est d’étudier et de proposer toutes les mesures tendant à organiser la production et la commercialisation des graines de semences et plants. Ce pouvoir est de consultation, d’étude, d’élaboration et de contrôle.
    • 3. Mme Clément-Nissou ne représente pas le Gnis au sein de la Commission européenne. Elle n’est plus directrice des Relations internationales du Gnis et a été proposée par le ministère de l’Agriculture comme expert national auprès de la Commission pour ses compétences unanimement reconnues et doublées d’une grande intégrité.
    • 4. Le Gnis n’est pas « un groupe de pression défendant les intérêts de l’industrie semencière », pas plus qu’il ne « regroupe que les seuls professionnels engagés dans la logique industrielle ».Le Gnis est une interprofession qui représente toutes les professions intéressées par la sélection, la multiplication, la production, le commerce et l’utilisation des semences et des plants. A ce titre, il regroupe les professionnels privés, mais aussi les instituts publics de recherche en charge de la sélection et de la production, les agriculteurs multiplicateurs de semences, les distributeurs, les agriculteurs utilisateurs et les transformateurs. Plusieurs centaines d’entreprises et des centaines de milliers d’agriculteurs sont membres du Gnis.En ce qui concerne les sélectionneurs et les producteurs de semences, tous les producteurs de semences de variétés anciennes sont présents au sein du Gnis, y compris des micro-entreprises dont le chiffre d’affaires est inférieur à celui de Kokopelli et qui, elles aussi, se sont spécialisées dans la vente de variétés anciennes. Kokopelli n’est victime d’aucun ostracisme et s’il n’est pas membre du Gnis ce n’est pas qu’il en est exclu, mais en raison de son seul choix.
    • 5. Le Gnis n’est confronté à aucun conflit d’intérêts.Le Gnis n’a jamais eu de mission de représentation officielle de la France.La mission de service public, de contrôle et de certification des semences conférée au Gnis sur le territoire français par le décret de 1962 est exécutée sous l’autorité d’un fonctionnaire détaché. Un commissaire du Gouvernement est présent. Le Gnis est accrédité ISO 45011 pour son activité de certification, ce qui garantit son impartialité et son indépendance. La réputation de qualité des semences françaises, en France et dans le monde, montre que ce contrôle de qualité obligatoire est effectué dans les conditions prévues par la loi française et européenne, et sans aucun laxisme vis-à-vis des opérateurs.

Réplique de Kokopelli à la réponse du GNIS

Réplique de Kokopelli :

Sur la liberté de semer

On peut s’interroger sur le contenu réel de cette liberté, prétendument défendue par le GNIS, lorsque la liberté de donner, échanger et vendre des semences a été sévèrement circonscrite par la législation, comme c’est le cas actuellement. Lorsque l’offre semencière devient très réduite sur le marché, quelle est la liberté de semer pour l’agriculteur ?

La législation sur le commerce des semences a précisément été mise en place pour contrôler ce qui est semé par les agriculteurs, et, par ce biais, faire de l’agriculture un autre secteur d’expansion des méthodes industrielles.

Mais il est vrai que revenir à des variétés du domaine public, comme celles que distribue l’association Kokopelli, permet aux agriculteurs de recouvrer leur autonomie et de semer et re-semer ce qu’ils souhaitent.

Par ailleurs, les variétés destinées à la mise sur le marché ne doivent pas être simplement « déclarées », ainsi que l’écrit le GNIS, mais elles doivent faire l’objet d’une Autorisation préalable de Mise sur le Marché (AMM – comme pour les médicaments, les OGM ou les pesticides), procédure beaucoup plus lourde, qui, ayant été mise en place sans faire aucune référence à un risque sanitaire ou environnemental, est tout à fait critiquable, ainsi que l’a relevé l’Avocat Général dans l’affaire portée devant la Cour de Justice de l’Union Européenne par Kokopelli.

Cette procédure d’AMM va bien au–delà d’un objectif de « traçabilité » : elle vise en réalité à assurer l’uniformité des semences, pour répondre aux besoins de l’agriculture industrielle, en même temps qu’elle fait la promotion des droits de propriété intellectuelle, qui sont octroyés aux semenciers sur les mêmes critères que ceux permettant d’obtenir l’AMM.

Revenons enfin sur la loi du 8 décembre 2011 sur le Certificat d’Obtention Végétale et les semences de ferme. Elle est présentée par le GNIS comme permettant d’ « élargir la liberté de semer », « à la seule condition de rémunérer le sélectionneur pour son travail». Mais quel est donc ce nouvel usage du mot « liberté » ? S’il fallait se fier au dictionnaire Larousse, qui définit le terme de « liberté » comme « la possibilité d’agir selon ses propres choix, sans avoir à en référer à une autorité quelconque », alors il faudrait plutôt dire que la loi du 8 décembre 2011 instaure une « obligation de payer » et non une « liberté de semer ».

Par ailleurs, pourquoi le paysan devrait-il « rémunérer le sélectionneur pour son travail » alors que celui-ci a déjà perçu cette rémunération lorsqu’il lui a vendu ses semences (à un prix d’ailleurs exorbitant) ? Les sélectionneurs prétendent que faire un usage personnel, à plusieurs reprises, d’une semence protégée, devrait être interdit car cela équivaudrait à la production de contrefaçons. Un peu comme s’il n’était pas possible d’écouter un CD plusieurs fois ou qu’un logiciel informatique devait s’autodétruire passé un certain délai, pour vous interdire d’utiliser ces produits, même à titre personnel, plus de temps que souhaité par leur créateur…

Bien que ce raisonnement soit inadmissible, car ce n’est en fait pas la rémunération de leur travail que poursuivent les sélectionneurs, mais la recherche d’une situation de rente, ils ont réussi à l’imposer dans la législation internationale, européenne et maintenant nationale.

Et le GNIS défend ici leurs intérêts, à l’évidence contre celui des agriculteurs. Et ce alors que le premier secteur économique est florissant, alors que le second est en crise.

Sur les origines du GNIS et ses compétences réglementaires

La loi du 11 octobre 1941, qui a créé le GNIS et qui est signée « Le Maréchal de France, chef de l’Etat français : PHILIPPE PETAIN », n’a absolument pas été abrogée. Ayant été diminuée de quatre articles par le Décret du 18 mai 1962, elle est toujours en vigueur, ainsi qu’en atteste le site Légifrance.

Malgré les dénégations du GNIS, il faut rappeler que l’article 3, al. 5 de la loi du 11 octobre 1941 rend les propositions du GNIS « obligatoires pour tous les membres des professions intéressées dès qu’elles ont reçu, selon le cas, l’acquiescement du ministre d’Etat à l’agriculture ou du commissaire du gouvernement ».

L’article 2 du décret du 18 mai 1962 le charge par ailleurs de « proposer toutes mesures tendant à organiser la production et la commercialisation » des semences, d’ « élaborer un statut définissant les obligations et les charges des diverses professions », d’en « fixer les modalités d’application » et d’en « surveiller l’exécution », ainsi que d’ « organiser le contrôle de la production, de la conservation et de la distribution » des semences.

C’est ainsi par exemple que l’Arrêté du 19 septembre 2008 a été pris « Sur proposition du service officiel de contrôle et de certification » (organe technique du GNIS).

Plutôt que « le GNIS législateur », nous aurions pu écrire « le GNIS pouvoir réglementaire », mais ces deux expressions ne sont-elles pas équivalentes ?

C’est d’ailleurs certainement ce que voulait dire le GNIS lorsqu’il évoque son pouvoir d’ « élaboration », et il semble que nous soyons d’accord sur ce point…

Nous constatons de plus que le GNIS confirme sa mission de contrôle de l’application des textes et n’a rien à dire sur sa mission d’agent de répression des fraudes, toutes choses qui ne sont pourtant pas banales pour un organisme fait d’opérateurs privés.

Sur Madame Clément-Nissou

  1. Nous remercions ici le GNIS de confirmer le fait que Madame Isabelle Clément-Nissou, anciennement Directrice des relations internationales du groupement, a été mandatée par la France pour participer à la rédaction de la nouvelle proposition législative européenne sur le commerce des semences.Nous ne l’avions pas inventé !Que son contrat avec le GNIS ait été suspendu avant d’entrer dans son poste d’ « expert national » ne surprendra personne.

    De même, que ses compétences et son intégrité soient unanimement reconnues nous est relativement indifférent.

    Ce qui nous gêne ici, c’est précisément qu’elle ait été employée par le GNIS juste avant d’être mandatée par la France auprès de la Commission Européenne.

    Cette situation semble bien caractériser un conflit d’intérêts, définit par l’OCDE comme « un conflit entre des responsabilités publiques et des intérêts privés chez un fonctionnaire public, dans lequel ce dernier a des intérêts d’ordre privé pouvant indûment influencer l’accomplissement de ses devoirs et responsabilités officiels », ces intérêts privés pouvant être issus de ses relations avec son précédent employeur privé, ainsi que l’OCDE en donne l’exemple.

Sur la nature du GNIS

  1. Le GNIS est constitué de huit sections thématiques et d’un comité central. L’article 7 du décret du 18 mai 1962 prévoit expressément que « les membres des sections sont nommés pour trois ans par le ministre de l’agriculture sur proposition des organisations professionnelles les plus représentatives ».Les organisations « les plus représentatives » sont évidemment celles qui sont engagées, en France, dans la logique industrielle, et les membres des organisations professionnelles les moins représentatives sont donc absents des sections du GNIS.Ainsi en va-t-il de Kokopelli mais aussi de la plupart des membres du Réseau Semences Paysannes (RSP), de la Confédération Paysanne, de la Coordination Rurale, de la Fédération Nationale de l’Agriculture Biologique (FNAB), du Syndicat National d’Agriculture Bio-Dynamique (SABD), de la Coordination Nationale pour la Défense des Semences Fermières (CNDSF), etc.

    Aussi faut-il mentionner le fait qu’il n’existe pas au sein du GNIS de mécanismes d’adhésion et de démission. Les « membres » du GNIS sont affiliés au groupement par le biais des « cartes professionnelles », qu’il est obligatoire de prendre (et de payer) auprès du GNIS pour pouvoir exercer l’une des professions du secteur. Ces affiliations obligatoires permettent au GNIS de dire qu’il représente « plusieurs centaines d’entreprises et des centaines de milliers d’agriculteurs », mais elles ne reflètent en réalité aucun mouvement d’adhésion volontaire. De même, les « représentants » de ces différents professionnels sont désignés par arrêté ministériel et ils ne peuvent quitter le groupement en cas de désaccord.

    Il s’agit d’un corporatisme imposé, similaire au carcan rigide des corporations de l’Ancien Régime, qui a été restauré, après son abolition par la Révolution française, par le régime de Vichy.

    Quant aux démarches du GNIS en tant que « groupe de pression défendant les intérêts de l’industrie semencière », elles sont innombrables et apparaissent dans pratiquement tous ses communiqués. Le GNIS s’est par exemple fortement mobilisé, dans ce sens, lors du vote de la loi du 25 juin 2008 sur les OGM, ou plus récemment pour l’adoption de la loi du 8 décembre 2011 sur le Certificat d’Obtention Végétale. Son parti-pris apparaît également dans ses positions concernant le protocole de Nagoya, le GNIS exigeant un accès sans limite aux ressources phytogénétiques des pays du Sud.

    Que dire également de la fondation par le GNIS d’ IBV – Initiatives Biotechnologies Végétales, dont le nom de domaine est www.ogm.org/qui-sommes-nous.html et dont le but est ouvertement la promotion des OGM ?

Sur les missions conférées au GNIS et les conflits d’intérêts

Le GNIS, qui est à la fois un groupement de professionnels du secteur privé et un organisme doté de missions de service public, incarne la notion même de conflit d’intérêts, telle que définie par l’OCDE (V. ci-avant) et il est grotesque de voir le GNIS se donner des allures d’organisme impartial et indépendant !

Dans la mise en œuvre de ses missions, la prise en compte des intérêts privés de ses « membres » est permanente, et cela est bien naturel puisque c’est le législateur qui a façonné l’institution de cette manière-là.

Mais cela doit cesser, car cette organisation n’est pas garante de l’intérêt général, lequel doit être protégé par des fonctionnaires publics, coupés de tout lien avec l’industrie.

Même le GNIS semble avoir honte de ce mélange des genres puisqu’il nie ses « missions de représentation officielle de la France » !

Celles-ci, pourtant, sont nombreuses et incontestables. Ainsi faut-il remarquer, à titre d’exemples, que le GNIS était présent, pour la France :

Notons par ailleurs que la Confédération paysanne, par un Communiqué du 2 fév. 2011, a également dénoncé le fait que le gouvernement français avait désigné un représentant du GNIS pour défendre la position française sur les droits des agriculteurs lors de la réunion de l’Organe Directeur du Traité international sur les ressources phytogénétiques pour l’alimentation et l’agriculture (TIRPAA) devant se tenir à Bali du 14 au 18 Mars 2011.

Ce communiqué n’a jamais été démenti par quiconque.

Enfin, une lettre adressée au Premier Ministre (ici) il y a trois ans par un collectif d’une cinquantaine de chercheurs publics engagés dans la gestion de la biodiversité agricole a dénoncé le fait que « l’administration et le pouvoir politique ont totalement délégué aux seuls membres du GNIS l’expertise et la représentation française dans les conférences intergouvernementales du Traité (TIRPAA) ». Aussi les scientifiques en appelaient-ils au Premier Ministre pour considérer le fait que « les questions relatives à la diversité des semences engagent lourdement le long terme et ne peuvent être laissées aux seuls acteurs privés ».

Pour conclure, le point de vue de Kokopelli semble être ici à la fois fondé et largement partagé : LES SITUATIONS DE CONFLIT D’INTÉRÊTS DOIVENT CESSER !